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16 mars 2023 870 vues
Philippe Brégaint, EAO : « La flexibilité constitue désormais un critère essentiel dans le choix d’une destination »

Philippe Brégaint, EAO : « La flexibilité constitue désormais un critère essentiel dans le choix d’une destination »

Le congrès de l’European Association for Osseointegration (EAO) s’est déroulé à Genève en 2022. L’événement a d’ailleurs reçu de la part du Bureau des Congrès le prix du congrès le plus impactant. Une occasion d’évoquer avec Philippe Brégaint, directeur exécutif, les réflexions actuelles et les enjeux des organisateurs de congrès.

Pour commencer, quelques mots sur l’EAO…

L’European Association for Osseointegration est une association médicale qui rassemble des dentistes autour des questions liées à l’implantologie dentaire. L’association organise un congrès annuel qui tourne dans les principales villes d’Europe. Traditionnellement, l’événement accueille entre trois et quatre mille congressistes en fonction de la destination, dont un quart est originaire de pays non-européens. Nous recevons également environ 1200 personnes représentant les exposants, un chiffre très élevé et inédit au regard du nombre de congressistes. L’édition de 2022, qui s’est déroulée fin septembre-début octobre à Genève, a marqué le retour d’un congrès en présentiel, après deux années d’arrêt total.

 


Justement, qu’avez-vous imaginé, pendant ces années de crise, pour conserver le lien avec vos congressistes et vos exposants ?

Comme tout le monde, nous avons tenté l’aventure 100% digitale et nous étions déjà convaincus que le webinaire ne constituait pas une bonne solution. Nous avons donc fait appel à une société de production d’émissions de télévision, avec l’ambition de faire évoluer les formats. Nous avons beaucoup appris de cette période avec des formats très enrichissants et scientifiquement très poussés. Le congrès online était alors gratuit pour les participants et financé par les sponsors. Près de 12’000 congressistes y ont assisté. Si en 2020, beaucoup de nos partenaires étaient sceptiques, la deuxième année, tous sont venus en masse.


Qu’avez-vous conservé de cette expérience digitale lors de votre retour au présentiel ?

Nous avons tenté en 2022 l’expérience d’un congrès On site/Online, en ayant recours aux services de la société de production TV qui nous avait accompagnée pendant les deux années Covid. Même si le programme scientifique avait été décidé avant la crise, nous avons essayé de transformer une partie des sessions dans un format davantage télévisuel, pour attirer une audience en ligne. Mais, même si nous sommes très contents d’avoir testé cette configuration et d’être allés très loin dans ce format « hybride », nous ne réitérerons pas la même expérience cette année à Berlin.

 


Pour quelles raisons ?

Les congressistes présents en salle nous ont remonté que le changement de format ne correspondait pas à leurs attentes. Quand, par exemple, nous décidons de réaliser un format de 22 minutes, à l’instar des programmes scientifiques à la télévision, nous ne sommes pas dans le format habituel d’un débat lors d’un congrès en présentiel. Par ailleurs, en termes de production, il nous a fallu deux équipes : une équipe TV venue à grand renfort de personnel pour la diffusion en ligne et l’équipe technique traditionnelle pour le présentiel. Le fonctionnement était assez compliqué et très coûteux. Dernière raison, nos sponsors ont privilégié leur visibilité sur le présentiel et ont beaucoup moins participé au format online. Ils nous ont fait comprendre qu’ils n’avaient pas forcément besoin de nous pour être présent sur du digital, pour lequel beaucoup consacrent déjà des moyens colossaux. En revanche, ils nous attendent toujours sur notre capacité à rassembler physiquement notre communauté.

 


Quels changements opérerez-vous donc lors de la prochaine édition ?

Nous avons consacré beaucoup de budget pendant ces trois ans pour la production de contenus disponibles en ligne. Il nous faut remettre en place le bon business modèle, moins dispendieux, et trouver le bon mix. Nous envisageons donc de retransmettre une conférence phare par jour sur une plateforme, comme nous le faisions d’ailleurs dès 2016 en « live sur Facebook ». Nous demanderons ensuite aux experts de « refaire le match » en studio, pour créer des contenus complémentaires dédiés à l’écran, faciles à consommer et plus économes en moyens de production. Puis nous produirons quelques émissions supplémentaires dans le studio dédié, pour couvrir quelques thèmes scientifiques additionnels. Tout cela doit constituer un juste équilibre, pour satisfaire à la fois les absents qui ne viennent que tous les deux ou trois ans sur le congrès, promouvoir l’association et ses missions auprès de ceux qui ne nous connaissent pas et livrer quand même du contenu à ceux qui ne viendront jamais sur un congrès présentiel.

 


Ces choix que vous faites disent-ils quelque chose du congrès de demain ?

Pour faire vivre l’association et ses projets, nous avons besoin de faire venir du monde sur nos congrès. Aucune association professionnelle qui veut maintenir un coût d’adhésion accessible au plus grand nombre, n’a trouvé, à date, une nouvelle recette miracle qui concurrence ce modèle. On essaie donc de réfléchir au bon système. Nous avons, à l’EAO, deux enjeux : trouver le bon équilibre dans le on site/online de nos congrès et satisfaire les sponsors qui font une sélection de plus en plus stricte des manifestations sur lesquelles ils souhaitent s’engager.

 

De gros changements sont-ils prévisibles sur ce point dans les années à venir ?

Assurément. Les choix des sponsors vont bousculer l’équilibre des associations. Nous ne savons pas encore où nous allons de ce côté-là, comme nous ignorons ce qui, demain, motivera la venue d’un participant sur un congrès. Devant ces incertitudes, nous appelons les acteurs locaux à être hyper flexibles. Nous ne pouvons plus nous engager sur des prestations fermes comme il y a dix ans. Nos partenaires (destination, palais des congrès, hôtels, traiteurs…) doivent d’ores et déjà s’adapter et être en capacité de réagir vite. Nous ne pouvons plus signer des contrats trop contraints. La flexibilité constitue désormais un critère essentiel dans le choix d’une destination. J’en profite pour féliciter celle de Genève et de Palexpo qui nous ont compris et totalement suivis dans ce sens, sur l’édition 2022.

 

Vous avez reçu le Prix du congrès le plus impactant en 2022, décerné par le Bureau des Congrès de Genève. Comment l’analysez-vous ?

Nous veillons vraiment à intégrer et mobiliser l’ensemble de l’écosystème local lorsque nous organisons notre congrès dans une ville. Nous cherchons à innover constamment, à faire bouger les lignes dans la relation que nous entretenons avec les acteurs locaux. C’est exactement ce qu’il s’est passé avec Palexpo et le Bureau des Congrès de Genève avec qui nous avons travaillé. Et je pense modestement que c’est cette attitude que ce prix voulait récompenser.


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